Une classe© Getty Images Une classeMaternelle : les ateliers philo de Stéphanie Fontdecaba, à Paziols (Aude)

« Les enfants sont plus curieux et plus loquaces »


Pourquoi va-t-on à l’école ? Etre amoureux, c’est quoi ? C’est à partir de ce genre de questions que Stéphanie Fontdecaba, professeure des écoles, mène chaque semaine des « ateliers philo ». « Définition des termes de la question, recherche d’exemples et de contre-exemples, exposé des raisons pour lesquelles on est d’accord ou non avec son voisin… Sur ses bases, mes élèves de 4 à 6 ans apprennent à appréhender le conflit sans en “venir aux mains”, en construisant leur propre pensée et en la confrontant à celle des autres », observet-elle. Des principes qui lui ont été enseignés il y a une dizaine d’années par Michel Tozzi, didacticien de la philosophie, qui travaille sur l’apprentissage de la philo chez les enfants. C’était pendant les vacances d’été, lors des rencontres annuelles menées par le Crap (Cercle de recherche et d’action pédagogiques), une organisation qui réunit des professeurs de tous niveaux pour échanger sur leurs pratiques. « Même si, à 4 ans, on n’en est pas à la conceptualisation, la façon d’exprimer un avis progresse au cours de l’année. Les parents me disent souvent que leurs enfants posent davantage de questions chez eux. »

Primaire : la « twictée » de Romance Cornet, à Champagneux (Savoie)

« Ma classe ne progresse pas qu’en orthographe ! »

Faire avec les autres, c’était l’un des objectifs de Romance Cornet quand elle a commencé la « twictée » (contraction de tweet et de dictée), il y a cinq ans, avec des CM1 et CM2. Au départ, elle dicte un texte ordinaire pour tous, puis la classe se divise en huit groupes et chacun choisit un passage (cent quarante caractères, l’équivalent d’un tweet). Ils seront envoyés par mail ou en message privé sur Twitter aux groupes d’une autre classe chargée de les corriger. Et inversement. Les élèves s’échangent ainsi leurs « twictées » en chassant collectivement les erreurs. Chacune est catégorisée (accord sujet-verbe, par exemple) et fait l’objet d’un bout de leçon, de la taille d’un tweet, qui apparaît avec le mot-dièse « twoutil ». « Mes élèves progressent en orthographe, mais aussi dans des compétences comme la recherche d’outils, la justification des corrections et le travail collaboratif », se réjouit l’enseignante. De plus, sa classe a déjà échangé des twictées avec des élèves libanais, marocains, canadiens et, plus récemment, avec ceux d’une école française de Chicago. En zone rurale, Romance Cornet voulait ouvrir ses élèves sur le monde et elle-même collaborer avec d’autres enseignants. Pari réussi.

Collège : la coopération selon Cyril Lascassies, à Tarbes (Hautes-Pyrénées)

« S’entraider pour réussir seul »

Lorsque ce professeur de mathématiques explique pourquoi il met en place des activités de coopération dans ses classes, il se réfère à une valeur de la République : la fraternité. « Pour aider quelqu’un, il ne faut pas forcément savoir et encore moins donner la réponse, mais poser les bonnes questions. Des élèves tuteurs appliquent ce principe avec les élèves “tutorés”. A ces derniers, bloqués sur un exercice, les premiers font chercher le théorème qui va tout changer ou leur demandent de retrouver un exercice similaire dans le cahier, la leçon correspondante, etc. », explique Cyril Lascassies. Cela s’accompagne de jeux de coopération où l’on a besoin des autres pour gagner… ensemble. Par exemple, retourner un tapis sur lequel on est tous debout sans poser les pieds à l’extérieur. Si, si, c’est possible ! A condition de coopérer. Pour le prof, c’est avec cette approche solidaire, quand on ose demander de l’aide et en apporter aux autres pendant les exercices d’entraînement, que l’on parvient à réussir seul son évaluation.

Collège : les objets antistress de Chloé Wable-Ramos, à Rouen (Seine-Maritime)

« Plus personne ne se tortille sur sa chaise »

Cette professeure d’anglais a eu le déclic il y a deux ans en observant l’un de ses élèves qui faisait tourner dans sa main son hand spinner – cette toupie à trois branches alors star des cours de récréation – pendant un contrôle. « Il manipulait l’objet, écrivait, le reprenait, se remettait à écrire. Alors qu’il avait habituellement une attention plus que papillonnante, là, il était hyper-concentré sur sa production écrite », se souvient-elle. Depuis, au collège Georges-Braque, situé en réseau d’éducation prioritaire (REP), les élèves de sixième de Chloé Wable-Ramos entrent en cours en formulant en anglais des demandes d’accessoires plutôt surprenants : des gros ballons de fitness, des coussins d’équilibre, une table haute pour travailler debout et toutes sortes d’objets à manipuler… Ainsi, l’enseignante ne passe plus son temps à demander à des élèves de s’asseoir, de ne plus se balancer sur leur chaise ou d’arrêter de faire du bruit en triturant un stylo ou un tube de colle. Autant de temps de gagné pour travailler.

Collège : la relaxation selon Laurent Bastien, à Saint-Dizier (Haute-Marne)

« Mes classes sont plus calmes et plus cultivées »

Dans ce collège de REP, l’entrée en cours d’histoire-géo se déroule sur fond de musique classique. Tête dans les bras sur la table, yeux fermés, durant six ou sept minutes, les élèves imaginent une statue exposée au Louvre, décrite d’une voix douce par Laurent Bastien, leur professeur. En fin de séance, ils découvrent et touchent la reproduction miniature de la Victoire de Samothrace, déposée au préalable dans une boîte par l’enseignant. Aux collègues qui lui demandent s’il ne perd pas trop de temps, le prof assure au contraire en gagner, juste en ramenant ses élèves au calme en début de cours. Résultat, « leur culture générale s’enrichit à chaque fois d’une œuvre musicale et d’une œuvre d’art », ajoute Laurent Bastien, qui forme désormais d’autres enseignants à sa démarche.

Lycée : le « tétra-aide» de Valérie Rambaud, à Romorantin-Lanthenay (Loir-et-Cher)

« Tout part des émotions »

En contrôle de SVT, au lycée Claude-de-France, chaque élève de la classe de Valérie Rambaud peut afficher son état émotionnel (rassuré, fatigué, bloqué, paniqué…) en positionnant son « tétra-aide » sur sa table. Ce triangle en volume affiche une émotion à chaque angle qu’il convient de tourner vers le sommet. A l’élève fatigué, l’enseignante suggérera de faire quelques pas dans le couloir. Pieds et mains bien à plat, elle guidera celui qui panique vers une respiration apaisée. En une question, elle permettra à l’élève bloqué de se remémorer la technique qui lui échappe. « Il n’y a pas de solution miracle, prévient l’enseignante, mais si l’on dit à son cerveau : “Je ne vais pas y arriver”, on n’y arrive pas ! Avec cet outil très simple, on peut gagner en confiance, donc en réussite. »

Lycée : la classe inversée de Geneviève Ponsonnet, à Orsay (Essonne)

« C’est le meilleur moyen d’apprendre sa leçon »

Lasse de voir des élèves en freiner d’autres en cours, Geneviève Ponsonnet, prof de physique depuis plus de quinze ans, a bouleversé sa pédagogie il y a cinq ans. Avant d’entrer dans sa classe, ses élèves du lycée d’Orsay doivent désormais regarder chez eux une vidéo de trente minutes à une heure. Une fois en classe, le cours démarre par un travail en groupe : l’essentiel de ce qui a été compris et retenu de la vidéo par les uns est synthétisé et présenté aux autres. « La classe inversée permet d’apprendre la leçon pour ensuite effectuer des exercices, apprécie l’enseignante, qui note que ses élèves, de la seconde à la terminale, sont plus autonomes et maîtrisent mieux les méthodes. Ils font deux ou trois fois plus d’exercices qu’avant par chapitre, dit-elle, et chacun peut adapter la difficulté à ses besoins. » Du sur-mesure.

Une ONG dans les classes

« De l’inspiration naît l’action » : c’est le slogan du Projet Imagine, une ONG fondée par la réalisatrice Frédérique Bedos, qui intervient notamment dans les écoles. A Paris, en Ile-de-France, à Nantes, à Brest ou à GrandeSynthe, dans le Nord, ce sont huit centsélèves, du CM1 à la terminale, qui ont suivi cette année le programme « Ecoles Imagine ». L’idée ? Accompagner les élèves et leurs enseignants dans la mise en place d’un projet solidaire. « Nous les aidons à choisir leur projet, comme la réalisation des rêves d’enfants malades ou l’organisation d’une action intergénérationnelle, en les mettant en relation avec des associations », explique Marine Tous-Lion, chef de projet. Au premier trimestre, les élèves votent pour leur action et rencontrent l’association locale sur laquelle s’appuyer. Le deuxième trimestre est consacré à la définition des objectifs, le rétroplanning, la répartition des tâches… Vient ensuite le temps de la réalisation en autonomie par les élèves. L’opération a un coût, entre 500 et 2 000 euros pour les écoles qui y adhèrent, lesquelles sont parfois parrainées par des partenaires privés. Objectif pour 2020 : toucher deux mille élèves. Autant de futurs « héros humbles », comme ceux de la série de Frédérique Bedos sur le site* de l’ONG : « Des individus ordinaires dont les actions extraordinaires participent à la construction d’un monde plus solidaire. »

Isabelle Maradan pour MSN.COM

LE MEILLEUR ABOUTISSEMENT DE LA'EDUCATION